Qu’il s’agisse de soutenir le plan de la Barbade visant à transformer le financement climatique mondial ou de rechercher l’adhésion au G20, le climat a été une question clé lors du récent sommet.
Du 17 au 19 février, les chefs d’État de l’Union africaine (UA) se sont réunis lors de la 36e assemblée annuelle à Addis-Abeba pour discuter d’une profusion de défis auxquels le continent est confronté. Le climat était à l’ordre du jour, Macky Sall, président du Sénégal et président sortant de l’UA, soulignant que l’Afrique continue de subir le poids du réchauffement climatique, d’une crise sanitaire sans précédent et d’une guerre majeure.
Pour faire face à ces difficultés, les chefs d’Etat ont souligné la nécessité pour l’UA d’être représentée au Conseil de sécurité de l’ONU, réclamant au moins deux sièges permanents et cinq non permanents. L’importance de l’adhésion au G20 a également été réitérée, Sall annonçant que 50% du groupe intergouvernemental avaient déjà exprimé leur soutien à l’UA et que l’adhésion à l’adhésion à part entière était en bonne voie.
L’adhésion au G20 renforcerait non seulement la participation de l’Afrique au sein des principaux forums multilatéraux, mais donnerait également l’occasion à l’Afrique de contribuer à l’initiative du G20 sur la suspension du service de la dette et la réaffectation partielle des droits de tirage spéciaux (avoirs de réserve internationaux créés par le Fonds monétaire international[IMF]). Ces instruments pourraient être utilisés dans des échanges « dette contre climat » – dans lesquels la dette d’un pays est annulée en échange d’engagements à financer des projets climatiques nationaux – ou pourraient libérer de l’espace budgétaire pour que les pays africains puissent dépenser pour des mesures liées au changement climatique.
Lors de l’assemblée de l’UA, le président Sall a dénoncé l’iniquité des pays africains dont la cote de crédit a été dégradée pendant la pandémie et par la suite, alors que les pays développés ont été épargnés, et a souligné la nécessité d’une réforme du FMI et de la Banque mondiale pour mieux prendre en compte les intérêts de l’Afrique. A cette fin, il a appelé les pays africains et la Commission de l’UA à participer activement à la Initiative de Bridgetown sur la réforme de l’architecture financière mondiale. Dirigée par le Premier ministre de la Barbade, Mia Mottley, l’Initiative Bridgetown propose des changements audacieux dans la manière dont les institutions financières mondiales fournissent des financements climatiques aux pays du Sud.
Comité des changements climatiques
Le 18 février, le Comité des chefs d’État et de gouvernement africains sur le changement climatique (CAHOSCC) de l’UA s’est réuni parallèlement à l’assemblée. Son coordinateur, le président kenyan William Ruto, a appelé les pays africains à tirer parti de leur importante capacité d’énergie renouvelable et de l’abondance de minéraux nécessaires aux technologies vertes. Il a appelé les pays africains à apporter leur voix à la transition de leadership en cours à la Banque mondiale pour rendre l’institution réactive, sensible au climat et adaptée à son objectif. Son message direct à la Banque mondiale, au FMI et à la Société financière internationale (SFI) était « Africanisez ou périssez ! »
Les dirigeants africains de la CAHOSCC ont également entériné la décision de participer à la procédure judiciaire engagée par la Commission des petits États insulaires sur le changement climatique et le droit international (COSIS) devant le Tribunal international du droit de la mer (ITLOS). La procédure a été lancée en décembre 2022, lorsque le COSIS a soumis une requête pour un avis consultatif sur les obligations juridiques des États vis-à-vis de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer pour prévenir, réduire et contrôler le réchauffement des océans, l’élévation du niveau de la mer et l’acidification des océans. Bien qu’un avis juridique du TIDM ne soit pas contraignant, il aurait une grande influence sur les litiges ultérieurs entre États et contribuerait au développement du droit international coutumier (non codifié) sur la responsabilité juridique des États en matière de changement climatique. La position de l’UA sur cette question démontre l’appétit du continent à s’attaquer à l’inégalité d’être le principal porteur des pertes et dommages climatiques et peut soutenir ses positions de négociation dans d’autres forums.
Préparer la COP28
En vue de la COP28 plus tard cette année, la CAHOSCC a exhorté le Groupe africain de négociateurs (AGN) à continuer de plaider pour la reconnaissance formelle des besoins et des circonstances spécifiques de l’Afrique afin de débloquer des flux financiers supplémentaires. Il a souligné que les pays développés doivent honorer leur engagement de doubler le financement de l’adaptation et d’augmenter leurs promesses de financement climatique à au moins 6 000 milliards de dollars par an d’ici 2030. Les dirigeants africains ont également appelé à 4 000 milliards de dollars par an d’investissements dans les énergies renouvelables. énergie et a exhorté les négociateurs à rechercher un « résultat d’étape important » à la COP28 sur l’objectif mondial d’adaptation – c’est-à-dire quelque chose de plus qu’un simple accord pour continuer à discuter du contenu possible d’un objectif d’adaptation.
Le CAHOSCC a également souligné l’urgence d’opérationnaliser le Fonds pour les pertes et dommages et pour le comité de transition, qui est en train de créer le fonds, d’être guidé par les principes existants de l’Accord de Paris (tels que des responsabilités communes mais différenciées).
Le comité sur le changement climatique a en outre salué le programme de travail sur les transitions justes établi lors de la COP27 et a invité les pays africains à envisager leurs propres voies uniques vers un développement à faible émission de carbone et résilient au changement climatique. C’était pour aller à l’encontre de la suggestion selon laquelle il existe une solution unique. Les États membres ont été encouragés à poursuivre la préparation du bilan mondial où les pays évalueront leurs progrès collectifs dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris lors de la COP28 et ont été invités à formuler des recommandations pour éclairer les objectifs d’atténuation, d’adaptation et de financement climatique.
Enfin, l’UA s’est félicitée d’une proposition de la République du Congo de lancer une Décennie africaine et mondiale du reboisement pour lutter contre le changement climatique. Une conférence internationale sur cette question se tiendra en République du Congo en novembre 2023. En tant que coordinateur du CAHOSCC, le Kenya accueillera le Sommet africain sur le climat du 4 au 6 septembre 2023.
Une version de cette pièce a été initialement publiée sur Fil sur le climat africain.