La guerre russe en Ukraine a ces jours-ci un front inattendu sur le continent africain. Le président français, Emmanuel Macron, est au milieu d’une tournée régionale de trois pays stratégiques dans ce qui est son premier voyage hors d’Europe après sa réélection en avril dernier. Mardi il s’est rendu au Cameroun, ce mercredi il est au Bénin et demain il ira en Guinée Bissau. L’objectif est de renforcer (ou renouer) les relations, notamment avec les anciennes colonies, où la France perd sa zone d’influence politique et commerciale. Vous souhaitez protéger vos zones stratégiques mais arrêter également l’offensive russe sur le territoire.
Ce n’est pas un hasard si le voyage du dirigeant français a coïncidé avec le parcours parallèle du ministre russe des affaires étrangères, Serguei Lavrov, afin d’élargir le périmètre d’influence dans la région et de renforcer ses alliances. Lavrov s’est rendu en Égypte, en Éthiopie, en Ouganda et au Congo.
La présence et le poids, à la fois économique et politique, que la France a eu en Afrique francophone, la soi-disant « Francafrique », a été fortement critiquée par les anciennes colonies, où il y a toujours eu un certain sentiment anti-français. Ceci, combiné aux problèmes croissants d’insécurité, a ouvert la porte à de nouveaux acteurs sur le territoire, comme c’est le cas avec la Chine et la Russie.
Mardi, lors de sa première escale au Cameroun, Macron a critiqué « l’hypocrisie des pays qui ne reconnaissent pas l’invasion russe » de l’Ukraine et accusé Moscou d’utiliser la crise céréalière comme « une arme de guerre », car elle les bloque. Ce mercredi, lors d’une conférence de presse au Bénin, il a affirmé que la Russie est « l’une des dernières puissances impériales coloniales » après son invasion de l’Ukraine.
Influence russe
Le Cameroun a signé un accord de défense avec la Russie au printemps dernier, alors que la France tenait ses élections présidentielles. Un accord que le gouvernement du pays africain a qualifié de « routine diplomatique », mais qui a profondément préoccupé l’Elysée.
A ces mouvements inconfortables s’ajoute la visite début juin du président du Sénégal (également une ancienne colonie), Macky Sall, qui assure la présidence de l’Union africaine, en Russie pour rencontrer Vladimir Poutine et dénoncer les conséquences que la crise énergétique et surtout la nourriture qu’ils ont sur le continent africain.
L’influence russe grandit dans des pays clés pour la France, comme le Mali ou la République centrafricaine, où Paris perd le poids qu’il avait autrefois. La Russie, pour sa part, est vendue comme un allié clé pour garantir la sécurité et dans la lutte contre le terrorisme.
PRIORITÉ STRATÉGIQUE
Après le dernier coup d’état au Mali, La Russie a réussi à faire en sorte que le gouvernement du pays force l’expulsion de la France de la régionoù elle disposait d’un contingent militaire pour combattre le djihadisme, et a effectué son propre déploiement par l’intermédiaire de Wagner, une compagnie de mercenaires proche du gouvernement de Vladimir Poutine et qui est utilisée lorsque le Kremlin ne veut pas envoyer ses propres soldats.
Dans ce contexte géopolitique complexe L’Afrique est désormais « une priorité diplomatique pour la France », selon les mots de l’Elysée, alors que ce déplacement d’Emmanuel Macron « lui permettra de réaffirmer son attachement au développement d’une nouvelle relation entre la France et le continent africain ».