Les ressources côtières et marines seront au cœur de l’alimentation, de l’énergie et des emplois, à condition que les bonnes stratégies soient mises en place.
Il est clair pour tous ceux qui veulent écouter que la planète est confrontée à une crise climatique. En tant que secrétaire général de l’ONU, António Guterres a dit en référence au rapport 2021 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il s’agit « d’un code rouge pour l’humanité. Les sonnettes d’alarme sont assourdissantes et les preuves sont irréfutables ».
Ce que l’on sait moins, c’est que le monde est aussi confronté à une crise des océans. Nous avons tous vu des images de forêts défrichées et d’exploitation minière à ciel ouvert à grande échelle, mais nous sommes beaucoup moins conscients que des pratiques tout aussi inquiétantes ont lieu dans les mers profondes.
Par exemple, moins de la moitié de toutes les zones clés pour la biodiversité marine sont protégées. Les zones mortes de l’océan (zones qui manquent d’assez d’oxygène pour soutenir la vie marine) sont en hausse à un rythme alarmant, passant de 400 en 2008 à 700 en 2019. Et moins de 2 % des budgets nationaux de recherche sont alloués aux sciences marines. L’Afrique est particulièrement vulnérable. Le continent perd de précieuses zones de mangroves, vitales pour les nurseries marines. Pendant ce temps, le courant froid de Benguela, qui fournit des nutriments essentiels aux poissons namibiens, risque de se réchauffer, mettant en péril l’industrie de la pêche du pays. Les secteurs de la pêche de nombreux pays africains sont déjà menacés par une exploitation illégale, non déclarée et non réglementée.
Jusqu’à récemment, les zones côtières et marines du monde étaient considérées comme des ressources et des lieux de stockage illimités pour nos déchets. Les résultats vont de la dégradation des habitats côtiers et de la pollution marine à la surpêche. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 57 % des stocks mondiaux de poisson sont pleinement exploité et 30 % supplémentaires sont surexploités. Ceci est important car les pêches marines contribuent généralement 270 milliards de dollars par an à l’économie mondiale, selon la FAO. De toute évidence, nos utilisations actuelles de « l’économie bleue » ne sont pas durables.
Parmi les 17 objectifs de développement durable des Nations Unies, l’objectif 14 (La vie sous l’eau) est le moins financé. Seul 0,01 % de l’aide publique au développement destinée aux ODD est affectée à cet objectif, et même les investissements privés et les financements d’organisations philanthropiques sont largement insuffisants. Il est essentiel que la communauté internationale relève les défis du code rouge de l’économie bleue de l’Afrique pour intensifier le flux de financement vers ce défi et déployer des programmes de financement innovants tels que les obligations bleues et d’autres mécanismes de financement innovants.
Le « mouvement » de l’économie bleue a été renforcé par l’adoption par l’Union africaine (UA) de la Stratégie Maritime Intégrée Africaine 2050adopté en 2012, et est en train d’être poursuivi par le biais du Stratégie de l’économie bleue en Afriqueadopté en 2020.
L’UA a qualifié à juste titre l’économie bleue de « nouvelle frontière de la Renaissance africaine ». Ceci est essentiel car 37 pays d’Afrique ont des côtes et 90% du commerce de la région se fait par voie maritime. Zones maritimes sous juridiction africaine total sur 10 millions de km² avec un vaste potentiel d’exploitation minière offshore et en eaux profondes. De toute évidence, les ressources côtières et marines joueront un rôle essentiel en tant que source de nourriture, d’énergie et de développement économique dans un avenir prévisible.
L’économie bleue est très prometteuse, notamment en trouvant des moyens de suivre une voie de développement économique à faible émission de carbone qui comprendrait la création d’opportunités d’emploi et la réduction de la pauvreté. Comme la Banque mondiale suggère« l’économie bleue est l’utilisation durable des ressources océaniques pour la croissance économique, l’amélioration des moyens de subsistance et des emplois, et la santé des écosystèmes océaniques ».
Compte tenu des enjeux élevés, il est essentiel que les politiques et les objectifs de l’économie bleue de l’Afrique soient élargis. Tout comme les initiatives vertes de développement durable sont prometteuses, les projets et activités de l’économie bleue pourraient également l’être. Il est impératif que tous les États adoptent des stratégies pour accroître la richesse et le bien-être des océans dans les années à venir.
Que les résultats de l’économie bleue tiennent leurs promesses est une autre question. Il ne fait guère de doute que des gains à court terme seront réalisés, notamment grâce, par exemple, à l’augmentation de l’aquaculture et aux progrès des technologies de la pêche. Pourtant, la durabilité à long terme de ces efforts nécessitera des efforts concertés et une volonté politique importante. Enfin, comme de nombreux défis tels que la pollution marine ou la sécurité maritime ne connaissent pas de frontières, les pays africains devront trouver davantage de moyens de renforcer la coopération régionale pour trouver des solutions.
Le colloque sur L’économie bleue de l’Afrique organisé par RAS le 30 mars fournira des moyens nouveaux et innovants d’examiner l’économie bleue de l’Afrique et comment changer le code rouge en code bleu.