Élections générales controversées et avenir de la transition démocratique au Soudan du Sud

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Crédit : Fondation Friedrich Naumann, 2018.

À l’approche du compte à rebours des élections générales et de la fin de la période de transition prolongée au Soudan du Sud, les opinions sont fortement divisées entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre la tenue d’élections. Les élections au Soudan du Sud devraient commencer en décembre 2024 et se terminer avec l’annonce des résultats. Les dernières élections générales au Soudan du Sud ont eu lieu en 2010, juste avant la fin de la période de transition, comme indiqué dans l’Accord de paix global. Lors des dernières élections, le président Salva Kiir Mayardit, l’actuel président, ainsi que des membres des assemblées législatives et des gouverneurs des États ont été élus au Soudan et au Sud-Soudan. Ce dernier faisait partie du premier mais jouissait alors d’une autonomie.

Initialement, les élections générales devaient se tenir après l’indépendance du pays, au plus tard en 2015. Cependant, en raison du déclenchement de la guerre civile en 2013, les élections ont été annulées. Malgré la signature de l’Accord sur la résolution du conflit au Soudan du Sud (ARCSS) à Addis-Abeba en 2015, qui a prolongé la période de transition de trois ans, la mise en œuvre de l’accord a échoué, entraînant la reprise du conflit en 2016, moins d’un an après l’accord a été signé. Par la suite, un accord de paix revitalisé signé en 2018 stipulait que les élections générales se tiendraient avant la fin de la période de transition. Cependant, en raison de difficultés, les partis ont convenu de prolonger la période de transition de deux ans supplémentaires avec les résultats des élections générales attendus en février 2025.

La question de savoir s’il faut organiser des élections dans les délais prescrits reste une question controversée entre les partis politiques qui ont signé l’accord de paix de 2018, les organisations de la société civile et la communauté internationale. Alors qu’il ne reste que 18 mois avant la fin de la période de transition prolongée, cette controverse reste non résolue.

Le Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM) a déjà nommé le président Salva Kiir Mayardit comme candidat à la présidentielle. Le parti a lancé sa campagne électorale dans le Grand Bahr el-Ghazal le 3 juillet 2023 par le biais d’un rassemblement public célébrant la nomination. Des campagnes similaires devraient avoir lieu dans le Grand Equatoria, en particulier dans la ville de Juba, comme l’a annoncé le gouverneur Louis Lobong Lajor de l’État d’Equatoria oriental.

Tous les groupes politiques du Soudan du Sud n’ont pas salué cette évolution. Le Mouvement de libération du peuple soudanais-en opposition (SPLM-IO) sous la direction de Riek Machar Teny rejette cette approche d’une transition démocratique, affirmant que les campagnes électorales sont prématurées. Au lieu de cela, le groupe a appelé à accorder la priorité à l’achèvement des dispositions de l’Accord de paix revitalisé, en particulier celles liées à la formation et à l’intégration des forces dans des organes militaires et de sécurité unifiés. Ils ont également souligné la primauté de la formulation de la constitution permanente de l’État et de la création de la Commission électorale générale pour superviser les élections ainsi que la création du Conseil des partis politiques et de la Cour constitutionnelle, si les élections devaient aboutir à un résultat équitable. .

La communauté internationale a une position différente. Ils résistent à l’idée d’organiser des élections avant de mettre pleinement en œuvre les termes de l’accord de revitalisation prolongé tout en s’opposant à toute nouvelle prolongation de la période de transition. Certains émissaires internationaux considèrent l’appel du SPLM à des élections anticipées et à des campagnes électorales globales comme une mesure préventive inutile à ce stade. Ils soulignent que les parties devraient se concentrer sur le respect des dispositions de la feuille de route d’août 2022. Cependant, l’accord est confronté à de nombreux défis, notamment en matière de financement qui, à son tour, sape l’appel de la communauté internationale à une mise en œuvre rapide sans fournir un soutien financier suffisant.

La tension et le désaccord actuels sur la mise en œuvre de la feuille de route menant aux élections générales aux dates prescrites pourraient potentiellement conduire à un retour à la guerre, favorisant davantage l’instabilité dans la région. Les directions opposées prises par les deux principaux pôles, le SPLM et le SPLM-IO, soulignent l’urgence du dialogue pour éviter l’effondrement de l’accord de paix et un retour au conflit. Des intellectuels, des analystes et certains anciens plaident en faveur d’un dialogue significatif et constructif pour sauvegarder la paix et la stabilité dans le pays. Par exemple, la lettre du général John Mourwell Majak aux dirigeants appelait au dialogue et à la collaboration continue des coalitions et alliances actuelles créées par l’Accord de paix revitalisé dans l’intérêt d’un Soudan du Sud pacifique.

La controverse entourant le calendrier des élections générales au Soudan du Sud, combinée à la mise en œuvre incomplète de l’Accord de paix revitalisé, pose des défis importants à la transition démocratique du pays. Un dialogue et une coopération significatifs entre toutes les parties prenantes sont essentiels pour traverser cette période critique et préserver l’avenir de la nation.