L’écoblanchiment de l’argent du sang ne devrait pas avoir sa place dans le sport africain

Le parrainage par TotalEnergies de la CAN, une célébration de l'unité et de la résilience africaines, était une insulte aux peuples de tout le continent.

Une bannière de TotalEnergies au bord du terrain lors d'un match de la Coupe d'Afrique des Nations (CAN). Crédit : Ryan Wilkisky/BackpagePix/Fédération Guinéenne Football.

La conclusion réussie de la Coupe d'Afrique des Nations (AFCON) en Côte d'Ivoire a mis en lumière l'esprit indomptable du continent et le pouvoir transformateur du football. Pendant un mois, les fans d'Afrique et du monde entier ont été complètement divertis. Le football était, une fois de plus, un langage universel qui unissait notre peuple au-delà des frontières, des idéologies et des objectifs.

La crise climatique a toutefois récemment mis un frein à cette situation. Alors que les conditions météorologiques extrêmes ont rendu la vie sur le continent plus imprévisible, domaine du sport n'a pas été épargné. Cette édition de la CAN, qui se tient généralement en juin-juillet, a été déplacée en janvier pour se prémunir contre les incertitudes météorologiques.

Ce fait rend encore plus insultant le fait que le sponsor principal du tournoi était TotalEnergies. L'une des plus grandes sociétés pétrolières et gazières mondiales, la multinationale française est au centre d’un réseau complexe de chocs à travers le continent. Ses projets extractifs suivent des modèles séculaires d'exploitation coloniale et néocoloniale caractérisés par un mépris pour la protection de l’environnement, les droits de l’homme et le bien-être socio-économique des communautés locales. Sans parler du rôle des combustibles fossiles dans la crise climatique.

L’ironie du fait que TotalEnergies parraine une célébration de l’unité et de la résilience africaines peut être constatée en examinant les dégâts et les perturbations causés par certaines de ses récentes activités sur le continent.

Au Mozambique, TotalEnergies a conclu un accord 20 milliards de dollars accord de gaz naturel liquéfié (GNL) en 2019. La quête du gaz ajoutée à un mélange volatile de tensions et d'insécurité dans la région nord de Cabo Delgado, contribuant au déclenchement d'un conflit armé qui a tué des milliers de personnes. déplacé des centaines de milliers.

En Ouganda, TotalEnergies construit le le plus long oléoduc sur le continent. Le projet d’oléoduc d’Afrique de l’Est (EACOP) a été décrit comme une « bombe à carbone » qui émettra plus de 34 millions de tonnes de dioxyde de carbone chaque année au cours des deux prochaines décennies. Le pipeline traversera des zones de biodiversité vitale, tandis que Human Rights Watch a rapporté que le projet déplacerait 100 000 personnes, mettant en péril leur vie et leurs moyens de subsistance.

Pendant ce temps, lors de la CAN, hôte de la Côte d'Ivoire, où TotalEnergies était accordé droits de construire un terminal de regazéification de gaz naturel liquéfié (GNL) en 2016, le changement climatique a déplacé des milliers d'habitants de ce centre autrefois animé de Grand-Lahou dans un contexte de montée des eaux, de tempêtes accrues, d’érosion côtière et d’intensification des conflits locaux autour de la diminution des ressources.

Ce ne sont là que quelques-uns des périls que les combustibles fossiles et leurs marchands font peser sur les peuples d’Afrique et de la planète. Le parrainage de la CAN par TotalEnergies est une tentative stratégique et égoïste de masquer les dommages à sa réputation dus à son bilan environnemental épouvantable. Un cas classique de greenwashing.

La compagnie pétrolière française profite énormément de l’exploitation des ressources naturelles de l’Afrique et laisse le continent supporter les coûts environnementaux, humains et sociaux. Cette dynamique perpétue également un cycle de dépendance et d’inégalité, enfermant les pays dans un paradigme qui donne la priorité aux gains économiques à court terme issus de l’extraction plutôt qu’au développement durable et à la santé à long terme.

Certes, le parrainage de TotalEnergies a boosté le grand prix de la CAN de 40 %, mais cela ne compense guère les déplacements massifs et les mauvais traitements infligés aux populations à travers l’Afrique. Investir des millions dans le sport tout en sous-indemnisant les ménages déplacés révèle une profonde tromperie. Cela met également en évidence le décalage flagrant entre le mécénat d’entreprise et une véritable responsabilité sociale.

Heureusement, des campagnes comme Expulser Total hors d’Afrique et Expulser Total de la CAN mettent en lumière les tentatives de greenwashing des entreprises pour détourner l’attention des Africains des aspects controversés de leurs opérations sanglantes. Les dirigeants africains ne doivent pas permettre à des sociétés comme TotalEnergies d'utiliser le sport comme un outil pour manipuler la perception du public et protéger leurs intérêts au détriment de la demande énergétique, du développement et du bien-être de l'Afrique. Accepter l’argent des pollueurs au nom du sport, c’est encourager les crimes climatiques. Cela doit cesser maintenant.