La ruée vers le Sahel s’intensifie – The Mail & Guardian

Intérêt direct : Les dernières troupes françaises se sont retirées du Niger le 22 décembre de l’année dernière, marquant la fin de plus d’une décennie d’opérations antijihadistes françaises dans la région du Sahel en Afrique de l’Ouest. Photo : Boureima Hama/AFP

Le Sahel, une région de 3 860 km de large située au sud du désert du Sahara et s’étendant d’est en ouest à travers le continent africain, a récemment attiré l’attention du monde entier.

Au cours de la dernière décennie, des problèmes tels que le terrorisme, l’insécurité et le trafic ont caractérisé la région.

Les prises de contrôle militaires ont été une source majeure de préoccupation dans la région et au-delà ces dernières années. Depuis 2020, la région a connu quatre coups d’État réussis et trois échecs.

Le coup d’État au Niger a particulièrement retenu l’attention. En effet, le Niger était considéré comme un « chouchou de l’Occident » et un modèle de gouvernance démocratique dans la région.

Malgré les défis auxquels la région est confrontée, la ruée vers le Sahel reste intense.

Les principaux acteurs de cette ruée sont l’Union européenne, la France, la Russie, la Chine et les États-Unis.

L’UE compte sur les pays sahéliens, en particulier le Niger, pour mettre un terme à l’immigration clandestine massive dans le bloc. Le Niger est un pays de transit majeur dans la région. Le Niger avait des partenariats de sécurité et de défense avec l’UE jusqu’à récemment, lorsque le pays a annulé unilatéralement les accords. C’est une source d’inquiétude pour l’UE.

Pourquoi ces puissances étrangères s’intéressent-elles au Sahel ?

En tant qu’expert en relations internationales et ayant étudié la région pendant plus d’une décennie, je vois les principales raisons comme suit :

  • Disponibilité des ressources naturelles ;
  • Situation stratégique de la région en Afrique ;
  • Intérêts économiques des pays impliqués dans la ruée ; et
  • Coopération en matière de défense et de sécurité sous forme de ventes d’armes.

Les puissances étrangères ont toutes leurs raisons de s’impliquer dans la ruée vers le Sahel.

La plupart des pays de la région du Sahel ont été colonisés par la France. Contrairement à la Grande-Bretagne, la France entretient des liens étroits avec ses anciennes colonies. Ils coopèrent dans les domaines de l’économie, de la défense et de l’extraction des ressources, pour ne citer que quelques domaines.

La France a le premier droit d’acheter toutes les ressources naturelles découvertes dans toutes ses anciennes colonies. Même si les relations entre la France et ses anciennes colonies semblaient cordiales, les récents coups d’État dans les pays francophones et les sentiments anti-français à travers l’Afrique ont révélé le contraire.

Les coups d’État ont été suivis de grandes manifestations contre la France et en soutien aux putschistes.

Malgré ces fissures, la France tient à maintenir son emprise sur ces pays, notamment en matière de coopération militaire et d’extraction de ressources. La France était réticente à retirer ses militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger malgré la rupture des partenariats militaires entre ces pays. Elle continue d’extraire les ressources naturelles de ces pays.

Les relations entre la Russie et de nombreux pays sahéliens ont été établies pendant la guerre froide et l’ère coloniale. Plus récemment, l’accent mis par les pays occidentaux sur les droits de l’homme, notamment lors des opérations antiterroristes, a rapproché les pays sahéliens de la Russie.

Alors que les alliés occidentaux exigent l’État de droit, la démocratie et les droits de l’homme en échange de sécurité et de soutien économique, la Russie se présente différemment. L’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 a également accru l’intérêt de la Russie pour le Sahel, soucieuse de conserver ses alliés en Afrique.

La Russie a ouvertement soutenu les régimes militaires du Mali et du Burkina Faso et a mis en garde contre toute intervention militaire au Niger lorsque l’armée aurait pris le pouvoir. Par ailleurs, le groupe Wagner, société militaire privée controversée et contrôlée par la Russie, coopère avec certains pays du Sahel. Le Niger a annulé son accord de défense avec l’UE et s’est tourné vers la Russie. Tous ces facteurs expliquent l’intérêt de la Russie pour le Sahel.

Comme la Russie, la Chine se présente comme une alternative à l’allié traditionnel (la France) des pays sahéliens. Avec un mantra de « non-ingérence » et de « respect de la souveraineté », la Chine s’est imposée comme un « partenaire » des pays du Sahel.

La région du Sahel est riche en ressources naturelles telles que le pétrole, l’uranium, le gaz naturel et le lithium. Les entreprises publiques chinoises opèrent au Niger, au Tchad, au Mali et au Burkina Faso.

Par exemple, le Mali possède potentiellement l’une des plus grandes réserves de lithium au monde et la société chinoise Ganfeng Lithium a massivement investi dans le pays. En outre, malgré le développement du matériel militaire chinois, la plupart des armes n’ont pas été testées. La Chine souhaite profiter des conflits au Sahel pour tester ses produits d’armement.

En 2019, les États-Unis ont ouvert leur plus grande base de drones en Afrique à Agadez-Niger. Un an auparavant, j’avais écrit sur les implications sécuritaires de la base pour la région.

Contrairement à la France et à la Chine, qui ont toutes deux d’importants intérêts économiques au Sahel, les États-Unis ont un fort intérêt militaire. Le Niger, en particulier, occupe une position stratégique et les États-Unis peuvent facilement faire voler des drones de surveillance et de reconnaissance depuis le pays pour couvrir le Sahel, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale.

Alors que la France est militairement délogée de ses anciennes colonies dans la région, les États-Unis tentent de combler le vide pour empêcher la Russie et la Chine d’établir une présence militaire supplémentaire.

Les États-Unis ont mis plusieurs mois à qualifier la prise de pouvoir militaire au Niger de coup d’État afin de ne pas perdre leur coopération et leur domination militaires stratégiques.

L’année 2023 a été particulièrement difficile pour les pays du Sahel. Avec des problèmes allant de l’instabilité économique à l’insécurité, la région reste fragile. Malgré l’instabilité et la fragilité, la lutte pour la région reste intense, avec la perte de l’emprise des alliés traditionnels comme la France et la montée en puissance d’autres puissances. Le Sahel est un pays à surveiller en 2024 et au-delà. —

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