Les préoccupations africaines donnent un aperçu des tensions liées au Bilan mondial

Le rapport de synthèse fait allusion à combustibles fossiles consensus, mais les négociateurs africains sont mécontents de son approche en matière d’équité, de financement et de transfert de technologie.

Le président du Groupe africain des négociateurs, Ephraim Mwepya Shitima, de Zambie, a fait part de ses préoccupations concernant le rapport sur le bilan mondial en ce qui concerne l’Afrique. Photo de IISD/ENB | Kiara Worth.

Lorsque les négociateurs climatiques du monde entier se réuniront aux Émirats arabes unis pour la COP28 du 30 novembre au 12 décembre, l’un des domaines prioritaires sera le bilan mondial. Ce contrôle des progrès accomplis par les pays vers leurs objectifs dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015 peut être comparé au mieux à un bilan des progrès collectifs. Il examinera les progrès (ou l’absence de progrès) des parties en matière d’atténuation, d’adaptation, ainsi que les moyens de mise en œuvre et de soutien tels que le financement, les pertes et dommages et les mesures de réponse.

Le bilan de cette année sera le premier jamais réalisé. Ses conclusions visent à éclairer les engagements ultérieurs des parties à travers leurs contributions déterminées au niveau national, les engagements climatiques nationaux auto-définis par les pays dans le cadre de l’Accord de Paris.

Le 8 septembre, les co-facilitateurs du dialogue technique sur le bilan mondial ont publié un Rapport de synthèse, sur la base des contributions reçues jusqu’à présent et des discussions en cours. Le rapport est inévitablement controversé dans la mesure où il aborde des questions difficiles et sert effectivement de résumé des progrès réalisés depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris. Naturellement, les auteurs du rapport ont été confrontés à des décisions délicates quant à la manière de formuler des points particuliers, sur quoi mettre l’accent, quels sont les principaux défis, quels sont même les objectifs de l’Accord de Paris et les raisons de l’absence de progrès.

Le rapport de synthèse met en évidence 17 conclusions techniques, indiquant clairement que – même si des progrès ont été réalisés – il reste encore beaucoup à faire. Il fait également des interventions intéressantes sur des questions relativement controversées.

Par exemple, le rapport constate que les Parties ne sont pas sur la bonne voie pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. Ce faisant, il affirme indirectement que 1,5°C est l’objectif de l’Accord de Paris, dépassant les débats historiques sur la question de savoir si l’objectif convenu est de 1,5°C ou de 2°C. Il constate également que pour atteindre le zéro net, il faut « développer les énergies renouvelables tout en éliminant progressivement tous les combustibles fossiles, en mettant fin à la déforestation, en réduisant les émissions autres que le CO2 et en mettant en œuvre des mesures tant du côté de l’offre que de la demande ». L’affirmation selon laquelle les combustibles fossiles nécessitent une élimination complète, et non seulement une réduction progressive, soutiendra ceux qui défendent ce point lors des négociations, comme l’Union européenne. Experts ont suggéré que l’inclusion de cet appel dans un document clé de l’ONU pourrait avoir un effet galvanisateur sur les négociations de la COP28. Le président de la COP26, Alok Sharma, a également « salué[d] l’appel du rapport à développer les énergies renouvelables et à éliminer progressivement les combustibles fossiles », déclarant que « ce seront sans aucun doute des points de discussion clés à la COP28 ».

Cependant, les représentants africains ont été moins réceptifs au document. Le président du Groupe africain des négociateurs (AGN), Ephraim Mwepya Shitima, a a soulevé des inquiétudes que les questions fondamentales soulevées par le rapport de synthèse n’ont pas été abordées. À titre d’exemple, il a souligné que « le droit au développement durable, à des transitions justes, à des voies multiples équitables et à l’équité sont des principes et des considérations importants qui débloquent l’ambition nécessaire dans les pays en développement. Mais le rapport évite de les aborder dans le contexte approprié et conformément à l’objectif global du [stocktake]». L’AGN a fait des observations répétées sur l’importance de préserver « l’espace politique pour les pays en développement enregistrant les progrès les plus faibles vers la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) ».

Le groupe africain souhaitait également que le document aborde le manque de financement et de transfert de technologie pour permettre une transition juste. Shitima a critiqué le rapport pour ne pas refléter de manière adéquate les différences entre les circonstances des pays et leurs capacités respectives, ainsi que la nécessité d’un financement adéquat et prévisible pour l’adaptation. L’AGN estime que la discussion sur l’architecture financière mondiale aurait pu être mieux élaborée pour inclure des recommandations claires suggérées par de nombreuses parties, y compris ses membres.

Ces controverses et débats offrent un avant-goût des points de tensions qui perdureront jusqu’à la COP28. Comme l’a déclaré Shitima : « nous sommes impatients de discuter des implications des conclusions de la phase d’évaluation technique au cours de la prochaine et dernière phase de l’étude. [the First Global Stocktake] de manière objective et constructive pour garantir qu’il atteint son objectif et motive les parties et la coopération internationale à démontrer des progrès et à renforcer l’action climatique et le soutien à la réalisation de l’objectif et des objectifs mondiaux de l’Accord de Paris ».


Cet article a été initialement publié par Fil Climat Africain.